Série de conférences Beutel Goodman : Les soins aux aînés


14 janvier 2019

De nos jours, les Canadiens sont confrontés à de nombreux défis autres que les placements en ce qui concerne la gestion de leur patrimoine. C’est pour cela que nous avons créé la série de conférences Beutel Goodman, dans un souci d’apporter de la valeur ajoutée en offrant des conseils plus généraux.

Cette nouvelle plateforme est destinée à offrir des renseignements utiles sur des sujets qui ne concernent pas toujours directement les placements, mais qui sont néanmoins importants du point de vue de la gestion de patrimoine. Nous y aborderons notamment la compréhension des documents juridiques tels que les procurations, ainsi que la planification de l’impôt, de la succession, de l’héritage et de la relève, en faisant appel à des spécialistes de ces domaines.

Pour la toute première conférence de notre série, nous avons le plaisir d’accueillir Pat Irwin, présidente et fondatrice d’ElderCareCanada, qui nous parlera du parcours en matière de soins aux aînés et qui offrira quelques conseils. L’organisation ElderCareCanada se spécialise dans l’aide aux familles afin de mieux gérer la dynamique entre les personnes âgées, leurs enfants adultes et le système de soins aux aînés.

Vous trouverez ci-dessous quelques conseils afin d’aborder la conversation avec un proche ou un ami âgé, ainsi qu’une liste de contrôle pour la planification des soins aux aînés. Vous pourrez également lire des études de cas illustrant les problèmes qui peuvent venir bouleverser même les plans les mieux élaborés. Les détails ont été modifiés pour des raisons de confidentialité, mais les scénarios présentés ont été réellement vécus par trois familles différentes. Dans chacun de ces cas, Mme Irwin décrit la situation initiale, le moment charnière et la nouvelle solution trouvée. Elle souligne également les points importants à retenir pour les personnes qui commencent à donner des soins à un aîné afin d’éviter les problèmes courants et de mettre toutes les chances de leur côté pour parvenir à une issue positive.

 

Les soins aux aînés

De sa préparation à sa prise en charge, le processus de vieillissement pose un certain nombre de défis émotionnels, logistiques et financiers pour les personnes âgées et leur famille. Des premières réflexions et discussions sur les soins aux aînés jusqu’à la gestion quotidienne de soins de plus en plus complexes, les obstacles à surmonter sont nombreux.

Le système de soins n’est pas particulièrement aisé à naviguer, et même la meilleure des solutions peut échouer si une situation imprévue survient. Néanmoins, les familles n’ont pas à redouter les soins aux aînés. Même si le cheminement n’est pas toujours simple, un peu de préparation et d’information peut contribuer grandement à surmonter les obstacles.

Aborder la conversation sur les soins aux aînés

Il y a de nombreux facteurs et éventualités à étudier en détail, c’est pourquoi Mme Irwin conseille aux familles de discuter ouvertement des plans en matière de soins aux aînés avant qu’un événement inattendu ne provoque une véritable situation de crise. Toutefois, il peut être délicat d’entamer cette conversation.

Même si la plupart des aînés ont sûrement déjà beaucoup réfléchi aux soins dont ils auront besoin plus tard, beaucoup se sentent gênés d’aborder ce sujet avec leurs proches, voire réticents. Il peut donc être utile de faire appel à une tierce personne de confiance. Une réunion informelle initiale, potentiellement sans les membres principaux de la famille, peut ouvrir la voie à de futures discussions plus approfondies. L’intérêt de recourir à une tierce personne est sa neutralité face à des questions stressantes et chargées d’émotion, comme le vieillissement et la peur de perdre le contrôle. Il est souvent plus aisé de faire comprendre qu’il est nécessaire de formuler un plan lorsque l’aîné n’a pas à s’inquiéter que son enfant adulte essaie de « se débarrasser » de lui, même si ce n’est pas le cas.

Quelle que soit la manière dont la discussion est menée, il peut menée, être utile de suivre une liste de contrôle simple comme celle présentée ci-dessous. Une fois que le plan est formulé par écrit et conservé dans un endroit sûr et accessible, la famille peut reprendre le cours normal de ses activités. La personne âgée est alors rassurée, sachant qu’elle gardera le contrôle tout au long du processus de vieillissement et qu’un plan est prévu pour aider ses proches à gérer ses soins à l’avenir.

Liste de contrôle pour la planification des soins aux aînés

 

  • Avez-vous désigné un mandataire (nommé sur une procuration)? Cette personne vit-elle près de chez vous et est-elle capable d’assurer une surveillance adéquate si cela devient nécessaire?
  • Avez-vous rédigé un testament? Le mandataire n’a pas besoin d’en connaître le contenu, mais il doit pouvoir y accéder en cas de besoin.
  • Disposez-vous d’un plan financier? D’un héritage? D’un plan successoral?
  • Que pensez-vous de l’idée d’emménager dans un logement plus petit?
  • Souhaitez-vous rester dans votre domicile et « vieillir chez vous » ou
    bien vous installer dans une collectivité de retraités?
  • Avez-vous fait des recherches sur les résidences pour retraités qui offrent un continuum de soins?

(Remarque : cette liste est proposée à titre indicatif seulement; elle n’est pas exhaustive et ne se prétend pas meilleure qu’une autre.)

 

Étude de cas no 1 : Déménagement dans une collectivité de retraités

Situation initiale

Judy, âgée de 78 ans, reçoit un diagnostic de démence suite à un accident vasculaire cérébral. Après avoir vu des publicités pour une maison de retraite de luxe et être allée la visiter, elle décide de s’y installer, sans consulter son mandataire. Malgré le fait qu’il s’agisse d’une résidence de vie autonome, les choses se déroulent bien pendant un certain temps. Cependant, Judy a besoin de davantage de soins en raison de la progression de sa démence, et on finit par lui dire qu’elle doit trouver un autre logement.

Malheureusement, aucune unité de traitement de la démence n’est disponible dans son quartier. En attendant de trouver un autre logement, la maison de retraite insiste pour que Judy se procure des soins privés. Les résidents sont autorisés à employer les soignants de leur choix, mais comme ceci n’a pas été bien expliqué à Judy, elle fait appel à une agence appartenant à la société mère de la résidence, ce qui entraîne des frais supplémentaires importants. De plus, Judy ne veut pas laisser les soignants privés entrer dans son appartement. Ceux-ci restent donc à sa porte sans rien faire toute la journée, et Judy ne reçoit pas les soins appropriés.

Moment charnière

Le mandataire, un avocat, reçoit une facture de 35 000 $ correspondant à un mois de soins privés tous les jours, 24 heures sur 24, ainsi que d’autres frais. Judy n’a pas les fonds pour des soins de longue durée aussi coûteux.

Problèmes

  • Pas de planification globale à long terme. Aucune recherche adéquate n’a été effectuée pour trouver une résidence offrant un continuum de soins (c’est-à-dire qui permet de passer aisément entre appartement de vie autonome, vie autonome en maison de retraite, logement assisté et soins de longue durée assurés par un établissement provincial).
  • Évaluation initiale insuffisante par la résidence. Le « personnel des ventes » de la résidence n’a pas tenu compte des besoins à long terme de Judy dus à ses antécédents médicaux, notamment le diagnostic de démence. De plus, le mandataire n’a pas été consulté et n’a pas été inclus dans le processus décisionnel.

Nouvelle solution

Judy a été transférée, à contrecœur, dans la seule unité prenant en charge la démence disponible à l’époque, bien loin de son ancien logement et de son système de soutien. Malheureusement, son petit chien, qui l’aidait à briser la glace avec les autres résidents, n’a pas été autorisé à l’accompagner dans cette résidence. Un plan adéquat prévoyant un continuum de soins aurait permis d’éviter cette situation regrettable.

Enseignements à retirer

 

  • Toutes les collectivités de retraite ne permettent pas de « vieillir chez soi ». Faites des recherches et posez beaucoup de questions avant de prendre une décision.
  • Vous pouvez faire venir vos propres soignants privés en toutes circonstances; vous n’êtes pas obligé d’utiliser l’agence affiliée à votre maison de retraite.
  • Tenez compte du continuum de soins dans votre plan pour n’avoir à déménager qu’une seule fois.

 

Étude de cas no 2 : Personne restée chez elle avec une aide familiale résidante

Situation initiale

Hélène, âgée de 89 ans, est atteinte d’arthrite grave et de douleurs chroniques. Célibataire, la seule famille qui lui reste vit en Floride. Elle a bien des mandataires, mais ceux-ci ne l’ont pas vue depuis six ans. Étant donné qu’une aide familiale résidante s’occupe déjà d’elle depuis un certain temps, les mandataires décident de laisser Hélène dans son domicile pour lui permettre de vieillir chez elle, une situation qui semble idéale.

Moment charnière

Les mandataires sont informés par la police que l’aide familiale a été arrêtée. Celle-ci vendait les médicaments antalgiques sur ordonnance d’Hélène et lui donnait à la place de l’aspirine, ce qui lui causait des douleurs terribles et des hémorragies internes. Qui plus est, elle avait installé un cadenas à l’extérieur de la chambre d’Hélène et la renfermait la nuit, dans sa propre maison. Les mandataires ont également découvert que l’aide sous-louait toutes les chambres de la maison d’Hélène et empochait les loyers, qu’elle utilisait la carte de débit d’Hélène pour payer « l’épicerie » et qu’elle avait convaincu Hélène d’obtenir un prêt hypothécaire inversé sur sa maison sous prétexte de payer des réparations inexistantes. Après la vente de la maison, il reste très peu à Hélène pour vivre en raison des intérêts composés qu’elle doit.

Problèmes

  • Mauvaise vérification initiale du fournisseur de soins. Il arrive souvent que des gens bien intentionnés conseillent un fournisseur de soins recommandé par « l’ami d’un ami ». Il est tentant d’utiliser ces recommandations au lieu de suivre la procédure normale, car les agences peuvent se révéler coûteuses. Toutefois, l’absence de processus de contrôle ou de vérification approfondie des antécédents peut mettre la personne en grave danger.
  • Aucune supervision du mandataire. Un appel téléphonique de temps en temps ne remplace pas la surveillance en personne pour vérifier ce qui se passe. Bien qu’elle ait reçu des soins dans son propre domicile, Hélène vivait une situation extrêmement dangereuse sur le plan financier, physique et émotionnel.

Nouvelle solution

Hélène est immédiatement transférée dans une maison de retraite ayant une place disponible, et la procuration est confiée à un avocat local. De plus, l’ancienne aide est inculpée, les « locataires » sont expulsés, et la maison est nettoyée, redécorée, puis vendue.

Enseignements à retirer

 

  • Rester dans sa maison peut être une option viable et réconfortante, mais il faut une supervision adéquate des soins comme des finances. Des visites régulières sur place sont indispensables.
  • De nombreuses personnes préfèrent que leur mandataire soit un membre de leur famille; cependant, un mandataire ne résidant pas avec l’aîné est généralement une solution peu pratique.

 

Étude de cas no 3 : Soins de longue durée dans un foyer de soins

Situation initiale

Russell, âgé de 92 ans, est atteint de la maladie de Parkinson; sa mobilité est limitée, mais il a gardé toutes ses facultés cognitives. Il est finalement accepté dans un foyer de soins de premier choix subventionné par l’État après avoir été sur liste d’attente pendant cinq ans. Sa famille est ravie et tout semble bien se dérouler lorsqu’elle l’aide à s’y installer.

Moment charnière

Dès la première semaine, Russell appelle sa fille cinq ou six fois par jour pour lui dire qu’il déteste le foyer. Il reste au lit, ne s’habille plus, ne va pas prendre les repas et refuse les soins, et il devient alors gravement dépressif. La famille entière, qui pensait avoir fait le bon choix, ne comprend pas la situation et se sent coupable.

Problèmes

  • Attentes en matière de soins non satisfaites. Dans les foyers subventionnés par l’État, il y a un nombre limité de soignants par rapport aux résidents; ainsi, il peut y avoir un seul soignant ou accompagnateur pour six résidents. Même si la plupart des autres résidents s’en accommodaient, le fait d’avoir à attendre pour recevoir ses soins le matin gâchait toute la journée de Russell. Il se sentait ignoré et méprisé.
  • Non-respect des valeurs fondamentales. Le foyer n’avait pas appris certains renseignements cruciaux concernant Russell (par exemple qu’il venait d’un milieu militaire, qu’il était important pour lui de se lever tôt le matin et qu’il devait avoir une apparence soignée pour se sentir bien dans sa peau). De plus, il avait été un haut dirigeant puissant lorsqu’il était plus jeune, c’est pourquoi il se sentait rabaissé lorsque le personnel l’appelait par son prénom.

Nouvelle solution

La famille embauche deux soignants hommes pour fournir des soins privés à Russell de 7 h à midi tous les jours, en alternance pour assurer la continuité. La vie antérieure de Russell est également recréée (son logement est réaménagé pour ressembler davantage à un bureau, avec une table de travail, un fauteuil club, un grand téléviseur et un lit de repos), et ses soignants lui apportent chaque jour le Globe and Mail avec un café et une rôtie. Russell est alors prêt à prendre sa douche, puis il s’habille avec un veston et une cravate. Il se sent alors mieux dans sa peau et est prêt à faire des activités ou aller voir des amis.

Enseignements à retirer

 

  • Les gens ne changent pas de personnalité lorsqu’ils s’installent dans une maison de retraite. Il faut veiller à ce que les valeurs fondamentales soient comprises et que toutes les parties concernées s’entendent sur une stratégie commune pour aider le résident à maintenir une bonne estime de soi.
  • Il est important d’établir une structure quotidienne, surtout pour les personnes qui vivent avec une maladie chronique qui leur fait perdre un certain contrôle. Les gens ont besoin de savoir que leur journée a un sens.
  • Il ne faut pas passer de jugement sur quelqu’un en raison de ses besoins ni punir une personne parce qu’elle est qui elle est.

 

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Sujets connexes et liens d’intérêt :

 

Pat M. Irwin – Fondatrice et présidente, ElderCareCanada

Après avoir travaillé dans les services financiers pendant 25 ans, la carrière de Pat Irwin a soudainement pris fin lorsque sa famille a dû placer son père, atteint de la maladie de Parkinson, dans un foyer de soins. Le problème n’était pas la résidence elle-même, mais plutôt le fait de ne pas connaître les choix qui s’offraient à elle. C’est ce qui l’a poussée à créer ElderCareCanada, un organisme de consultation et de défense des droits qui se consacre à aider les enfants adultes et leurs familles à prendre des décisions éclairées en matière de soins aux aînés.

Depuis 1998, elle a eu le privilège d’aider de nombreuses familles à comprendre les stratégies possibles en matière de logement, de soutien et de soins, de résidence pour retraités, de déménagement et de passage à un logement plus petit, de gestion des soins, de médiation relativement aux soins aux aînés et d’avis d’experts au tribunal. Elle possède une grande expérience dans les programmes de PAE, la formation et la sensibilisation, et elle est professeure dans le cadre du programme de certificat en gestion de collectivité de retraités. Pour de plus amples renseignements sur les services offerts par Mme Irwin, consultez le site Web de ElderCareCanada à l’adresse www.eldercarecanada.ca.

 

©2019 Résumé à l’aide de renseignements provenant de Pat Irwin, fondatrice et présidente, ElderCareCanada, avec la permission expresse de celle-ci. Le présent document ne vise aucunement à fournir des conseils d’ordre juridique, financier, comptable, fiscal, en matière de placement ou autre, et ne doit pas être utilisé à cette fin.