Série de conférences Beutel Goodman – Entretien avec CAE Inc.


5 octobre 2021

CAE Inc. est un excellent exemple d’entreprise que la plupart des consommateurs ne reconnaîtront pas, même s’ils ont probablement un lien avec elle. L’entreprise canadienne est un chef de file mondial en formation pour les industries de l’aviation civile, de la défense, et des soins de santé. CAE possède et opère des dizaines de centres de formation de pilotage dans le monde, en plus de construire des simulateurs avancés pour des exercices de formation virtuels sécuritaires.

L’action de CAE est devenue un avoir dans le Fonds d’actions canadiennes de BG en avril 2020, lorsque l’action a chuté parallèlement à la réponse générale du marché à la pandémie de COVID-19. La direction de l’entreprise a élargi de manière agressive ses compétences de base et s’est diversifiée bien au-delà de son image initiale de fabricant de simulateurs.

Récemment, le président et chef de la direction de CAE, Marc Parent, s’est joint à Beutel Goodman pour un événement en ligne avec des clients afin d’explorer comment CAE a navigué la pandémie et à quoi pourrait ressembler l’industrie dans un monde post-COVID. Regardez l’enregistrement pour en savoir plus sur les nouveaux domaines de croissance de l’entreprise, sur être un leader en critères ESG, et sur comment leurs récentes acquisitions s’intègrent dans la stratégie globale de l’entreprise.

 

Cet enregistrement a eu lieu le 21 septembre 2021. La vidéo se déroule en anglais.

Série de conférences Beutel Goodman : Conversation avec CAE

VIM THASAN : Merci d’assister à notre conférence Beutel Goodman « Conversation avec CAE ». Je m’appelle Vim Thasan, vice-président et gestionnaire de portefeuille au sein de l’équipe Actions canadiennes à Beutel Goodman. J’ai le plaisir d’animer la conférence d’aujourd’hui et d’accueillir Marc Parent, président et chef de la direction de CAE.

CAE est un chef de file mondial en formation dans les domaines de l’aviation civile, de la défense et de la sécurité, et des soins de santé. L’entreprise se consacre à l’optimisation de la formation et des opérations critiques de ses clients grâce à des solutions numériques immersives qui améliorent la sécurité, l’efficacité et la préparation. CAE est une entreprise de haute technologie à la fine pointe de l’immersion numérique qui fournit des solutions afin de rendre le monde plus sécuritaire.

Nous connaissons CAE depuis pas mal de temps, et nous en sommes devenus actionnaires en avril 2020, au plus fort de la pandémie de COVID-19. L’entreprise a remarquablement bien résisté à la tempête et en est ressortie plus forte. Elle a nettement contribué à la performance du portefeuille d’actions canadiennes de Beutel Goodman.

L’homme à la barre est Marc Parent. M. Parent s’est joint à CAE en 2005 en tant que président de groupe, Produits de simulation, pour prendre en charge la division des produits de simulation civils. Son rôle s’est élargi en 2006 lorsqu’il a été nommé président de groupe, Produits de simulation et Formation militaire et services associés. En 2008, il a été nommé vice-président exécutif et chef de l’exploitation de CAE. Il était alors responsable de tous les secteurs d’activité et des nouvelles initiatives de croissance. L’année suivante, il a été nommé président et chef de la direction de CAE. M. Parent possède plus de 35 ans d’expérience dans l’industrie aéronautique et, en 2020, il a été nommé membre de l’Ordre du Canada en reconnaissance de ses réalisations qui ont grandement contribué au développement et à la croissance de l’industrie aérospatiale au Canada. Comme il détient aussi une licence de pilote, on peut dire que l’aviation n’a aucun secret pour lui.

Également avec nous aujourd’hui Andrew Arnovitz, vice-président principal, Relations avec les investisseurs et Gestion du risque d’entreprise. Il s’est joint à CAE en 2001 et, grâce à son leadership en matière de stratégie d’entreprise, il a aidé à faire passer CAE d’une entreprise qui fabrique principalement des produits industriels à un fournisseur de solutions en formation.

Je suis ravi d’accueillir Marc et Andrew pour discuter des réussites de CAE, des mesures qu’elle a prises pour traverser la pandémie et de ses plans pour l’avenir. Merci messieurs de votre participation.

MARC PARENT : Merci.

ANDREW ARNOVITZ : Merci, Vim.

MP : C’est un plaisir d’être ici.

VT : J’aimerais commencer par une question générale sur l’industrie, Marc. Pourriez-vous nous parler de l’impact de la pandémie sur le secteur du transport aérien et sur votre entreprise, et nous dire comment vous avez fait pour traverser une pandémie, alors qu’aucun manuel d’instructions n’existait, pour ainsi dire?

 

MP : Excellente question, Vim. Je répondrais en prenant pour exemple une conversation que j’ai réellement eue avec un pilote. Je ne vous dévoilerai pas son nom, mais vous pourrez probablement le deviner si vous effectuez des recherches. Un jour, il pilotait un gros Airbus au-dessus de l’Atlantique et, l’un après l’autre, ses deux réacteurs se sont éteints. Imaginez. Être aux commandes d’un avion de ligne en pleine nuit au-dessus de l’océan, et plus rien ne fonctionne. D’accord, je n’étais peut-être pas exactement dans le même état d’esprit, mais disons que je l’ai été pendant 10 secondes.

Je lui ai demandé : « À quoi avez-vous pensé à ce moment-là? »

Il a dit : « Vous savez, Marc, j’ai cru que nous étions tous morts. Puis, après environ 30 secondes, j’ai réalisé que nous étions en train de planer. C’est alors que je me suis dit : « Où est l’île? Où est la terre ferme? »

Bon, je dramatise. Mais pour répondre à votre question, évidemment, vous essayez d’anticiper les perturbations, les événements de type cygne noir. Et ça, c’est tout un cygne noir! Avant la pandémie, qui aurait pu prédire que 95 % des avions de ligne du monde seraient cloués au sol du jour au lendemain? Et c’est vraiment ce qui est arrivé à notre industrie, je pense.

Encore aujourd’hui, cet élément perturbateur est toujours là. Et nous, qui sommes un partenaire très intégré des compagnies aériennes, nous avons été frappés de plein fouet. Jamais dans ma carrière je n’aurais pensé que je demanderais à mon chef des finances, « Combien de liquidités avons-nous? ». Ni que je vérifierais le solde de trésorerie tous les jours, que je jonglerais avec toutes nos marges de crédit disponibles, et encore moins que nous licencierions un quart de notre personnel et que nous réduirions les salaires des dirigeants de 50 %.

Telle était la situation en mars 2020, tant pour l’industrie que pour nous. Mais, pour reprendre l’exemple de tout à l’heure, nous étions en train de planer sans trop savoir où nous allions aboutir. Cela n’a pas été long avant d’avoir la réponse. La situation évoluait devant nos yeux très, très rapidement. Et c’est dans ce genre de situation que notre entreprise se démarque. Nous réagissons rapidement. C’est comme ça que j’aime faire les choses : rester agile et jouer les cartes que j’ai en main. Et c’est ce que nous avons fait : nous avons réagi en conséquence. Et je pense que nous avons très bien réagi.

Mais, c’est la façon dont nous avons analysé la situation en 2020. En ce qui concerne nos activités, nous avons très rapidement pris conscience du fait que si 95 % des avions de ligne du monde étaient cloués au sol, le moment viendrait où ils seraient remis en service. Par exemple, le gouvernement des États-Unis a pris la décision de considérer le secteur du transport aérien comme un service essentiel, et les avions devaient continuer à voler, qu’ils soient remplis ou non.

Nous sommes un partenaire essentiel et nous jouons un rôle majeur dans l’écosystème des compagnies aériennes du monde entier, car la formation, c’est comme le carburant. Certains ne se rendent pas compte de l’importance de la formation dans notre industrie. Comme vous l’avez dit, je suis moi-même pilote, j’ai une licence de pilote de ligne. Je n’ai jamais piloté pour une compagnie aérienne, mais je le pourrais, en théorie. D’ailleurs, je pense que cela fait de moi un expert en la matière. En passant, comme je teste notre propre produit, je suis mon pire cauchemar pour mes collaborateurs qui me voient comme un espion!

Bref, nous jouons un rôle essentiel dans cette industrie. Vous avez tout autant besoin de carburant que de pilotes pour faire voler ces avions, et ces pilotes doivent retourner à l’entraînement tous les six mois ou chaque année, sinon ces avions ne volent pas. D’où la résilience de notre entreprise. Et c’est un peu la position dans laquelle nous nous trouvons depuis deux ans, en tant que fournisseur mondial de solutions en formation. Nous sommes une entreprise essentielle de classe mondiale.

Ça fait beaucoup d’informations pour commencer!

VT : C’est très bien, j’aime cette réponse : elle est très imagée. Merci pour tous ces détails. Et vous avez évoqué un aspect important, à savoir les mesures que vous avez prises rapidement. J’ai été très impressionné de voir à quelle vitesse vous avez réagi à ce moment précis, malgré la peur. Car ce n’est pas la première fois que vous traversiez une crise qui présentait aussi des occasions.

Comment avez-vous trouvé le moyen de trouver un équilibre entre, d’une part, l’accent mis sur la trésorerie, le bilan et la structure des coûts et, d’autre part, les occasions qui se présentent généralement dans les moments de panique?

 

MP : Tout d’abord, il fallait nous assurer que, quoi qu’il arrive, comme je l’ai dit, nous allons jouer les cartes que nous avons en main. Cela signifie que, indépendamment du scénario ou des prévisions sur la reprise de l’industrie, nous savons que nous pouvons nous en sortir et que, au bout du compte, nous réaliserons des bénéfices. Je suis vraiment très fier de ce que nous avons fait car, grâce aux mesures que nous avons prises, nous avons généré des flux de trésorerie positifs au bout d’un trimestre. Je pense que cela reflète les mesures que nous avons prises et qui n’ont d’ailleurs pas consisté à couper les robinets. J’y tiens particulièrement, car comme vous l’avez dit, toute crise présente des occasions. C’est une expression galvaudée, mais c’est tellement vrai. Il faut voir au-delà du désastre et chercher l’occasion à saisir. Et ceci est le pire désastre que nous ayons pu imaginer pour notre industrie et, bien sûr, pour le monde entier.

Donc, nous savions – et j’en étais fermement convaincu – que les gens allaient reprendre l’avion. Et nous le voyons partout où il n’y a pas de restrictions aux frontières. Aux États-Unis, par exemple, il n’y a aucune restriction concernant les déplacements intérieurs, et les gens reprennent l’avion en masse. Bien sûr, certains facteurs entrent en ligne de compte, comme le variant delta. Je pense qu’il y a une nouvelle normalité à laquelle nous sommes en train de nous adapter. Mais les gens ne vont pas cesser de prendre l’avion. Je pense qu’il y a une chose que les gens découvrent et qu’ils ne perdent jamais de vue, et c’est que personne ne tiendra pour acquis la possibilité ou le droit de prendre l’avion et de voyager. Plus personne ne tiendra cela pour acquis. C’est en soi un catalyseur de croissance.

Peu importe les prévisions, c’est ce que nous avons constaté. Nous avons pris les prévisions de l’Association du transport aérien international (IATA) en matière de croissance du trafic aérien par rapport à l’année précédente, qui nous semblent toujours raisonnables; les passagers reviennent pour de bon. C’est ce que nous voyons. Et nous nous sommes adaptés. Comme je l’ai mentionné, nous avons réorganisé notre structure des coûts, mais nous continuons à investir dans les secteurs qui vont être dynamisés une fois la pandémie terminée.

Évidemment, comme tout le monde, nous avons dû élaborer un nouveau plan stratégique, compte tenu de l’évolution de la conjoncture. Cependant, ça fait 35 ans que je travaille dans le secteur des avions d’affaires. Pendant 20 ans, j’ai pratiquement occupé tous les postes chez Bombardier Aéronautique, j’ai même commencé à l’époque où l’entreprise s’appelait Canadair. J’ai participé à la conception d’avions d’affaires. J’ai aussi dirigé Learjet. Il est donc évident pour moi que le fait que les gens se tournent vers les avions d’affaires privés pour leurs déplacements, ne serait-ce que pour la liberté qu’ils procurent, allait avoir un effet catalyseur. Et il est évident que les personnes ayant les ressources financières pour voyager en avion d’affaires et qui ne l’ont jamais fait représentent un vaste marché potentiel. Dès le début, nous avons vu cette occasion, qui est en train de se présenter.

À votre avis, est-ce que l’expérience dans les aéroports va devenir moins contraignante? Je ne le crois pas. En ce moment, en plus des enjeux de sécurité, il y a évidemment les questions liées à la santé et les files d’attente devant les comptoirs des compagnies aériennes. Ça va être chaotique pendant un certain temps. Ce que nous avons pu constater, c’est que l’aviation d’affaires connaît, jusqu’à présent, une année exceptionnelle – une reprise en « V ». En fait, aux États-Unis, le nombre de vols effectués par des avions d’affaires a dépassé son niveau d’avant la pandémie. Et on constate que l’Europe suit une tendance similaire.

Ce qui est très intéressant, selon moi, c’est que la majorité – plus de 50 % – de ces déplacements sont effectués par des néophytes. C’est très intéressant. Dès lors que l’on a goûté à la liberté que procure le fait de voyager en avion d’affaires, et que l’on peut se le permettre, on n’a pas envie de revenir en arrière, j’en mettrais ma main au feu. Et le facteur honte est moins présent qu’au moment de la grande crise financière, lorsque les dirigeants de GM se sont rendus à Washington dans leurs Gulfstreams pour témoigner lors des audiences au Congrès, et que cela n’avait pas eu bonne presse. Mais ce sentiment s’est quelque peu estompé. Et je pense qu’il en sera ainsi, en raison des réels avantages liés aux questions de santé.

Nous avons donc adapté nos activités et redéfini notre plan stratégique pour tenir compte de l’évolution de la situation non seulement dans le monde et dans notre industrie, mais aussi en dehors de notre industrie. Et comment CAE peut tirer parti de ses principaux atouts et des technologies, par exemple, sa culture de l’innovation, qui fait partie intégrante de l’ADN de l’entreprise. Comment pouvons-nous nous adapter au marché et à la reprise du trafic aérien civil, qui pourrait mettre trois, quatre ou cinq ans, qui sait, avant de retrouver son niveau d’avant la pandémie? Ça arrivera, mais qu’allons-nous faire en attendant? Nous allons investir dans les secteurs qui vont croître, et nous allons profiter de cette période pour nous renforcer. Ainsi, lorsque la reprise sera là, nous serons beaucoup plus forts.

Par exemple, nous avons éliminé de 65 à 70 millions de dollars en coûts récurrents. Lorsque nous l’avons fait, nous avons réuni nos équipes pour leur dire que nous ne pouvions plus nous contenter de nous laisser porter par la croissance naturelle de nos activités. Il s’agit d’une occasion de faire le point et de trouver des façons de nous améliorer. Et nous y sommes parvenus. Une grande partie de ce succès repose sur la puissance du numérique, que nous appliquons à l’ensemble de nos activités. Nous nous sommes engagés dans notre propre parcours numérique il y a environ quatre ans; par chance, le « timing » a été bon, car nous avons pu faire passer 10 000 employés au virtuel littéralement du jour au lendemain. Même moi, je n’aurais pas pu prédire que nous étions capables de faire cela. Mais grâce aux investissements que nous avons réalisés, nous avons pu le faire en temps opportun.

VT : Formidable, Marc. Et c’est une excellente transition vers la question suivante, car vous décrivez effectivement un environnement postpandémie, qui est encore plein d’incertitudes. Vous avez parlé des avions d’affaires, par exemple. Pourriez-vous donner plus de détails sur ce point? Vous avez notamment mentionné l’allongement des files d’attente dans les aéroports. Comment voyez-vous l’évolution des industries de l’aérospatiale et de la défense dans un monde postpandémie, en plus des réflexions dont vous nous avez fait part au sujet des avions d’affaires, de la technologie et peut-être de l’évolution de la gestion des aéroports?

 

MP : Pour ce qui est des compagnies aériennes, il ne fait aucun doute que les voyages touristiques vont reprendre et que la reprise sera solide. C’est ce que je pense. Quant aux voyages d’affaires, je crois qu’ils seront touchés d’une manière ou d’une autre. Cela dépend à qui vous demandez. Bon nombre de chefs de la direction et de professionnels du secteur du transport aérien – tout le monde, en fait – pensent qu’ils seront touchés. Mais en fin de compte, si vous regardez le volume d’affaires qui est généré, les revenus qui sont générés dans le secteur, je ne pense pas que le secteur sera touché dans l’ensemble.

La situation va évoluer mais, à mon avis, personne ne croit que nous allons continuer encore longtemps à tenir des réunions d’affaires sur Zoom ou sur Teams. Ce sera le cas pour certaines réunions. Mais la majeure partie de l’activité économique dans le monde repose toujours sur les PME, et elles n’ont pas nécessairement les ressources nécessaires pour décrocher de gros contrats récurrents. Je ne vois donc pas d’incidence négative importante à cet égard.

Nous avons déjà parlé de l’aviation d’affaires. Je la vois vraiment comme un secteur à fort potentiel de croissance qui comblera une partie du vide laissé, comme je l’ai mentionné, par les compagnies aériennes dans le domaine des voyages d’affaires. Je veux maintenant aborder le secteur de la défense – je sais que ce n’est pas tout à fait lié à la COVID-19, mais nous y avons vu des tendances émerger au cours des dernières années. Donc, en ce qui concerne les États-Unis et leurs alliés dans le monde, on est vraiment passé du mode « guerre contre le terrorisme » au mode « guerre symétrique », et on se prépare en conséquence.

Concrètement, qu’est-ce que cela signifie? Eh bien, demandons-nous ce que font les militaires quand ils ne sont pas en mission de combat? Ils s’y préparent. C’est ce qu’ils font. Ils sont continuellement à l’entraînement de sorte que, si un conflit éclate, ils seront prêts à réagir et pourront accomplir leur mission et rentrer chez eux sains et saufs. C’est ce qu’ils font.

Si vous suivez les audiences au Congrès et que vous écoutez ce que dit le secrétaire à la Défense, vous constaterez que l’attention se porte désormais sur la menace symétrique. Concrètement, de quoi s’agit-il? Bien sûr, nous pouvons deviner ce que c’est. Il s’agit essentiellement d’un conflit armé avec des États-nations qui sont de force équivalente et au cours duquel on ne sera pas nécessairement en mesure de contrôler l’espace aérien ou les espaces maritimes, et certainement pas l’environnement spatial ou le cyberespace. Malgré les difficultés des guerres en Irak ou en Afghanistan, demander une frappe aérienne par radio ne posait pas vraiment de problème. En revanche, si vous le faites alors que vous vous battez contre un adversaire d’une force à peu près équivalente, vous recevrez un missile en pleine figure parce que vous aurez été immédiatement repéré. Autrement dit, vous ne contrôlez pas l’espace cybernétique.

En quoi cela nous concerne-t-il? C’est simple : nous sommes une entreprise spécialisée dans la formation. Je vais parler des acquisitions que nous avons faites et des occasions que nous avons saisies lors de la pandémie de COVID-19 pour nous renforcer. Nous avons fait cinq acquisitions, dont la plus importante de notre histoire. Il s’agit de l’acquisition des activités liées à la formation militaire de L3 Harris, ce qui a fait doubler le chiffre d’affaires que nous réalisons auprès du département de la Défense des États-Unis, qui s’élève maintenant à plus d’un milliard de dollars.

Mais encore? Pensez à ce que font les militaires quand ils ne sont pas en guerre. Ils s’entraînent à la guerre. Contre quelle menace? Celle que fait peser un ennemi dont la force est à peu près équivalente à la leur. Et comment s’entraîne-t-on à parer ce type de menace? Eh bien, il n’y a qu’une seule manière de le faire, et c’est virtuellement. Vous ne pouvez pas le faire en vrai. C’est tout simplement impossible et beaucoup trop coûteux. Vous ne pouvez pas aller dans un désert et vous entraîner de manière vraiment efficace. Vous devez le faire virtuellement.

Et comment crée-t-on un environnement réaliste pour rendre tout cela possible? C’est là que nous intervenons. C’est notre spécialité. Pensez-y, à quoi sert un simulateur? Et nous sommes incontestablement les leaders mondiaux en matière de simulateurs. Eh bien, il s’agit essentiellement d’un dispositif dans lequel vous entrez et où nous avons créé un monde artificiel. Le réalisme est saisissant. Je peux vous dire qu’en tant que pilote, je l’utilise moi-même tous les six mois. Lorsque vous y entrez, vous oubliez que vous n’êtes pas dans un environnement réel. Lorsque vous avez un incendie moteur, vous réagissez exactement comme vous le feriez dans la vraie vie, car votre entraînement vous y aura préparé. Et c’est dans cet environnement que se produisent des choses comme celles que vous avez vues il y a quelques mois, lorsqu’un Boeing 777 en provenance de Denver a eu un incendie moteur. On a vu aux nouvelles que les passagers ont filmé l’incident. Il y a un moteur en feu, et le feu n’est pas maîtrisé. Ce n’est pas censé se produire. Je vous le dis, pour avoir conçu des avions, ça ne peut pas arriver. Mais c’est arrivé.

Mais quand on entend les pilotes, on a l’impression qu’ils discutent autour d’un café. Ils ne sont pas trop stressés. Pourquoi? Parce qu’ils ont été entraînés pour faire face à ce genre de situation : un événement qui, statistiquement, n’a aucune chance de se produire au cours de leur carrière. Mais si ça arrive, ces pilotes réagissent comme si de rien n’était. Et ils gèrent parfaitement la situation. C’est ce que nous faisons. Nous créons ce genre de simulateurs.

Au fil des ans, nous avons entrepris de combiner les simulateurs en les faisant interagir dans le cadre de simulations. Nous pouvons créer une guerre virtuelle, en quelque sorte. Donc, nous pouvons créer un environnement où les différentes forces armées, celles des États-Unis et de ses alliés, peuvent s’entraîner virtuellement. C’est notre expertise. Et c’est un autre exemple d’occasion de croissance mondiale pour nous.

Enfin, il convient de mentionner notre division CAE Santé. Nous avons une petite division axée sur les soins de santé à CAE. En quoi consistent nos activités? Nous offrons des solutions de formation axées sur la simulation dans le domaine de la santé. Et pourquoi sommes-nous présents dans ce secteur? Parce que dans le secteur des soins de santé, rien qu’aux États-Unis, le nombre de décès annuels dus à des erreurs médicales de toutes sortes est étonnamment élevé. Par exemple, on se trompe carrément de membre. Ça arrive rarement, mais ça arrive.

Concrètement, nous aidons à prévenir les erreurs médicales. Si on se fie au nombre de décès documentés dans les seuls États-Unis, cela équivaut à deux écrasements de gros-porteurs chaque jour. Si cela arrivait, nous serions combien à prendre l’avion, selon vous? Personne ne prendrait l’avion. Alors pourquoi laisse-t-on cette situation perdurer? Je suppose que c’est parce que les décès surviennent un par un, plutôt que tous en même temps, donc l’impact est moindre, sauf si c’est vous ou un être cher qui êtes touchés.

Pour améliorer la sécurité des patients, il faut notamment former les gens pour qu’ils puissent réagir de manière efficace et professionnelle à toute situation à laquelle ils seraient confrontés, comme pour les pilotes. Essentiellement, ils suivront la meilleure procédure ou auront la réaction parfaite si une situation grave se produit lors d’une opération. Pensez à la chirurgie non invasive et une question vient à l’esprit : « comment s’entraîne-t-on à pratiquer des chirurgies non invasives? » Eh bien, nous fournissons des appareils à cette fin.

Compte tenu de ce qu’on a vu au cours de la pandémie, je crois fermement qu’on accordera davantage d’importance à la formation dans le secteur de la santé; par exemple, pour pallier la pénurie d’infirmières. On commence à le voir, même si le secteur médical est encore très perturbé. Il suffit de penser à l’accès limité aux hôpitaux ou encore aux écoles qui sont toujours fermées. Malgré tout, nous sommes toujours très actifs dans ce secteur, et notre présence va se consolider à l’avenir.

Je suis très fier du fait que, pendant la pandémie, nous ayons été en mesure de tirer parti de nos compétences dans le secteur des soins de santé. Nous avons littéralement conçu des respirateurs à partir de zéro. Il ne s’agit pas d’appareils fabriqués sur mesure. Nous utilisons essentiellement nos compétences pour les concevoir de A à Z et assurer la production de 10 000 unités pour le gouvernement canadien dans le cadre de notre réponse à la crise actuelle. Quoi qu’il en soit, ce ne sont là que quelques-uns des scénarios dont je pense que nous allons pouvoir tirer parti à l’avenir, au sortir de cette pandémie.

VT : Formidable! Et vous avez en quelque sorte abordé le point suivant, soit le fait que l’industrie est en constante évolution et la manière dont CAE s’adapte à ces changements. Et vous avez évoqué des acquisitions clés, comme celle de L3 Harris, et l’environnement immersif. Peut-être qu’un jour CAE fabriquera un « holodeck », comme dans Star Trek et qu’on en verra dans le secteur des soins de santé.

Pourriez-vous nous parler de la façon dont l’entreprise a évolué sous votre direction? Et comme il semble que la sortie de la pandémie soit une autre étape dans cette évolution, pouvez-vous nous dire à quoi ressemblera CAE dans cinq à dix ans?

 

MP : Je pense que l’évolution est une constante, n’est-ce pas? Le changement est une constante. Tout le monde dit ça, mais c’est vrai. C’est ce que c’est. Quand j’ai commencé à CAE, il y a 16 ans de cela, la grande majorité de nos revenus provenait de la vente de simulateurs aux compagnies aériennes. Ça représentait environ 80 % de notre chiffre d’affaires. Je me souviens avoir lu mon premier rapport d’analyste d’une firme de courtage sur CAE en 2005 ou 2004. Il s’intitulait « The Gambler ». Je me suis dit que c’était un drôle de nom pour un rapport d’analyste de firme de courtage! Il prenait avec l’action de CAE une stratégie similaire à une stratégie de poker et disait qu’il fallait savoir quand les garder et quand passer.

L’idée, c’est de savoir lire le marché. Historiquement, l’aviation a toujours connu une croissance cyclique. Donc, si on voit que le marché est à la hausse, il faut acheter des actions de CAE, car l’entreprise va vendre beaucoup de simulateurs. Mais si la conjoncture devient défavorable, il faut passer son tour, car c’est le contraire qui va se produire. Et devinez quoi? Notre action a oscillé dans une même fourchette pendant des années. Elle n’a jamais franchi le palier supérieur, même si notre technologie était fantastique.

En fait, au fil des ans, nous nous sommes concentrés sur la création d’un flux de rentrées récurrents. Ça fait partie des changements que nous avons mis en œuvre. Nous nous sommes vraiment concentrés sur ce à quoi servent nos simulateurs, et sur l’intégration verticale dans ce marché – celui de la formation, évidemment.

Donc, vous nous avez vu accroître notre présence dans le marché de la formation et axer notre vision et notre mission sur la formation. Comme nous fabriquons et vendons les meilleurs simulateurs au monde, nous occupons toujours une position dominante. Mais aujourd’hui, nous nous tournons vers le marché de la formation qui, selon nos estimations, est un marché six fois plus important que celui des simulateurs. Et au lieu d’avoir une part de marché de 60-70 %, nous avions une part de marché de 25 %, alors que le marché progressait au même rythme que celui du trafic aérien, soit 3-5 % par année.

Résumons. Nous avons évolué en tant qu’entreprise, une entreprise de création d’infrastructure de formation. C’est l’évolution majeure que nous avons connue. Et nous avons bien exécuté cette stratégie. Et je pense que les dernières années d’efforts commencent à porter des fruits. Comme je l’ai mentionné, avant la pandémie, nous nous étions concentrés sur le numérique. Je pense que ça répond en partie à votre question sur l’avenir de l’entreprise, car ce que nous avons fait, essentiellement, c’est miser sur le tout numérique, comme tout le monde. Qu’est-ce que cela signifie? Eh bien, pour nous, cela signifie que nous avons pris tous nos simulateurs dans le monde et, en exploitant la puissance de l’infonuagique, nous avons recueilli les données et nous avons créé des dispositifs liés à l’Internet des objets qui nous renvoient les données en temps réel.

Compte tenu du fait que nous sommes, et de loin, le plus grand fournisseur de solutions de formation au monde – cinq fois plus gros que notre plus proche concurrent –, nous avons recueillons des tonnes de données. Et ça, c’est important. Nous pouvons évaluer objectivement la performance des pilotes. Je peux donc aller voir le PDG ou le chef des opérations d’une compagnie aérienne et lui dire : « Nous pouvons évaluer objectivement la performance de vos pilotes par rapport à tous les autres qui pilotent ce type d’avion partout dans le monde ». Ou comparer les transporteurs à bas prix à d’autres compagnies aériennes. Ne croyez-vous pas qu’ils voudront le savoir?

Je crois que oui. Pensez-y : encore aujourd’hui, dans de nombreux domaines, l’évaluation des pilotes se fait de manière subjective. Les pilotes sont en formation tous les six mois pour s’assurer qu’ils ont les compétences adéquates et qu’ils peuvent conserver leur licence. Les pilotes doivent renouveler leur licence tous les six mois. Un inspecteur s’installe derrière les pilotes et regarde comment ils se débrouillent. Il prend des notes. La vitesse est-elle appropriée? Suit-on la trajectoire de descente? A-t-on bien exécuté la manœuvre prévue en cas de panne moteur? Puis, les pilotes reçoivent leur note : réussite ou échec. C’est tout, et c’est subjectif.

Maintenant, à partir de toutes ces données, nous utilisons nos outils d’analytique pour donner des informations précises et utiles à nos clients. À quel point ces informations sont précieuses? Je pense qu’elles sont très précieuses. Les gens nous disent qu’elles le sont. Et comment obtenir ces informations? Eh bien, c’est simple : il faut s’entraîner avec CAE.

Je pense que c’est en partie la façon dont nous allons continuer à nous développer dans ce secteur, continuer à saisir les occasions qui se présentent dans le monde, alors que les compagnies aériennes sont encore très nombreuses à assurer elles-mêmes la formation de leurs pilotes. Donc, selon moi, l’exploitation de ce créneau constitue une occasion en or. C’est comparable à ce que EDS a fait il y a quelques années, je pense, lorsqu’elle a mis sur pied ses services d’externalisation des TI. Personne ne savait comment les choses allaient évoluer. Peut-être que Ross Perot le savait, lui. C’est un peu la façon dont j’examine la situation dans un autre secteur, mais je pense que la même règle s’applique à nous.

L’expertise qui découle de notre statut d’entreprise de formation de premier plan qui est en mesure de fournir toutes ces informations nous amène à poser la question suivante : pourquoi les compagnies aériennes devraient-elles assurer la formation de leurs pilotes, alors qu’elles pourraient externaliser cette activité? À bien y penser, on peut s’appuyer sur l’évolution du secteur pour aider les compagnies aériennes à se réinventer.

À leurs débuts, les compagnies aériennes avaient leurs propres services de restauration. Elles ont aussi dû créer leurs propres services d’entretien des moteurs, car ces services étaient inexistants. Elles ont dû les créer elles-mêmes. Mais aujourd’hui, bien sûr, la plupart de ces services ont été divisés ou externalisés. Et notre secteur arrive à ce stade. Nous nous sommes développés au fil des ans et nous avons profité de la pandémie pour nous renforcer. Nous sommes vraiment la seule option d’envergure mondiale pour la formation des pilotes.

On voit aussi ce phénomène dans le secteur de la défense, parce que les armées veulent réduire leurs coûts et investir plus d’argent dans le développement de technologies militaires plus efficaces. Dans l’armée, ce qui coûte le plus cher, ce sont généralement les effectifs. Si les organisations militaires doivent se tourner vers des fournisseurs privés, comme nous, pour atteindre leurs objectifs, nos services ont alors une grande valeur. Et je pense que beaucoup d’entre elles feront ce choix à l’avenir.

Par exemple, il y a à peu près quatre ans, nous avons convaincu l’armée américaine de nous confier toute la formation des pilotes sur les appareils à voilure fixe. Cela représente un volume impressionnant. Nous avons mis sur pied des installations sur d’anciens champs de cacahuètes que nous avons achetés en Alabama. Nous y avons construit un centre de formation et y avons mis tout l’équipement nécessaire. Ensuite, l’armée américaine nous a demandé de gérer pour elle l’ensemble de cette formation. C’est pour nous une voie qui regorge de possibilités.

Quand je pense à l’avenir – sur un horizon raisonnable, comme un horizon de placement, disons –, je vois un monde plein de promesses, et je suis très enthousiaste à propos des perspectives de croissance de notre entreprise. Nous devons évaluer objectivement notre rendement, bien sûr, et il nous faut être honnêtes sur ce point. Mais je pense que nous avons tout de même très bien mis en œuvre notre vision. Il faut souligner que nous avons connu une belle croissance jusqu’en mars 2020.

En février 2020, notre action était à 42 $, un sommet. Pour ce qui est de l’exécution de notre stratégie concernant la formation, nous n’aurions pas pu faire mieux. Nous nous concentrions sur trois principaux secteurs d’activité – l’aviation civile, la défense et les soins de santé –, mais cette croissance, nous la devons à l’aviation civile.

En défense, les choses allaient bien. Mais question marges et rendement du capital investi, il n’y avait vraiment pas de quoi pavoiser. Quant aux soins de santé – certains en parlent comme de mon « petit projet de sciences » –, nous n’en tirons pas vraiment de revenus dignes de mention. Par contre, nous ne perdons pas d’argent avec cela.

Après cette période, donc en pleine pandémie, nous avons réduit nos coûts fixes de 60 à 70 millions de dollars, sans égard au volume. Nous n’attendons donc pas que nos activités dans le secteur du transport aérien reviennent à leur niveau d’avant pour avoir le vent dans les voiles. C’est le premier point.

Le deuxième, c’est que nous avons fait cinq acquisitions, dont une en défense. Cela mérite que je m’y attarde. L’achat de L3 Harris, une entreprise spécialisée dans la formation militaire, c’est quelque chose de majeur, parce que cela fait passer à un milliard de dollars nos revenus provenant du département de la Défense américain. Nous devenons ainsi son plus grand fournisseur externe de formation, à un moment où il recherche des entreprises qui sont, comme nous, capables de créer des environnements virtuels répondant à ses besoins.

En regroupant les deux entreprises, il n’y a presque pas de chevauchement. L3 Harris se démarque pour les avions de chasse. De notre côté, nous avons une expertise dans le ravitaillement des aéronefs de transport. Elle fait les bombardiers, pas nous. Nous faisons tous deux les navires de surface, et elle nous apportera les sous-marins. Donc, pas de chevauchement. Nos cultures s’harmonisent parfaitement parce que Link, la division de L3 Harris que nous acquerrons, se spécialise aussi dans la formation.

Les employés de Link sont très heureux de rejoindre les rangs d’une entreprise dirigée par quelqu’un qui n’a qu’un objectif : augmenter le volume de formations que nous offrons. Ils veulent la même chose. C’est donc pour eux une perspective très agréable. Au sortir de la crise actuelle, je pense que nous serons bien mieux positionnés dans le secteur de la défense, où le principe « 1 + 1 = 3 » prévaut.

L’autre occasion intéressante dont je parle concerne principalement le département de la Défense américain. Nous avons acquis une entreprise qui génère 95 % de ses revenus aux États-Unis. Nous sommes aussi une entreprise de défense, mais canadienne. Historiquement, le département de la Défense ne nous apporte pas la majorité de nos revenus, environ 60 % venant d’autres clients. Nous avons donc des revenus supplémentaires venant du département de la Défense, et cela accroît notre pertinence à ses yeux, notamment en ce qui a trait aux avions de chasse. Cela nous ouvre un monde de possibilités, parce que nous sommes présents dans beaucoup de pays. Nous pouvons maintenant donner un coup de pouce à l’équipe de Link pour l’aider à vendre ses produits à l’étranger, que ce soit pour les équipements en région ou le marché secondaire. Il y a énormément d’appareils F-16, et donc des centaines de simulateurs pour apprendre à les piloter, et le marché secondaire représentent des possibilités de vente très intéressantes. C’est une occasion à saisir.

Côté aviation civile, nous avons voulu consolider nos activités en reprenant certains marchés ou concurrents. Nous avons repris un contrat excellent de Textron, qui a décidé que c’était le temps de se retirer. Nous avons aussi acheté un centre de formation, une excellente entreprise d’Amsterdam que nous connaissons bien parce que nous lui avons vendu tous ses simulateurs. Elle donne aussi dans la formation pour le transport aérien de marchandises, ce qui est bien, parce que, je ne sais pas pour vous, mais moi je reçois beaucoup de colis Amazon Prime.

Le transport aérien de marchandises est important, et les besoins de formation sont à la hausse dans ce domaine. C’est donc un atout pour nous. Nous avons essentiellement mis la main sur des petites entreprises qui nous permettent d’élargir nos activités en offrant des services en gestion des ressources du poste de pilotage. Pour les compagnies aériennes, nous sommes des partenaires de formation, et nous voulons étoffer cette relation. En ajoutant la gestion des ressources du poste de pilotage, nous devenons des partenaires en matière de technologies qui facilitent le développement de ces ressources. Nous entretenons des liens étroits, qui ne cessent de s’approfondir, avec les compagnies aériennes du monde entier.

Donc, pour synthétiser : Nous avons porté notre action à 42 $ seulement grâce à nos activités dans le secteur de l’aviation civile. Nous avons depuis réduit nos coûts. Nous avons fait cinq acquisitions qui nous ont rendus beaucoup plus solides, en aviation civile comme en défense. Les besoins en formation pour les avions d’affaires vont bondir, ce qui est une excellente chose pour nous, parce que nous sommes un fournisseur important dans ce marché, qui est en réalité un duopole. Pour toutes ces raisons, je crois sincèrement que notre entreprise a de très bonnes perspectives de croissance.

VT : C’est fantastique, Marc! Vous nous avez parlé de la direction que l’entreprise va prendre, mais aussi de ce qui ne faisait pas partie de l’environnement de CAE avant la pandémie, en ce qui concerne la défense et l’immersion numérique. Vous avez aussi mentionné un irritant, c’est-à-dire notre dépendance envers le service de livraison Amazon Prime. C’est un panorama très complet. Je me demande si nous pourrions discuter plus en détail de l’acquisition de L3 Harris, qui est très importante, en mettant l’accent sur les coûts et les revenus.

L’autre face du déploiement du capital, c’est le rendement pour les actionnaires. Pourriez-vous aussi nous dire ce que vous pensez de la suspension des dividendes dans le cadre des mesures prises en contexte de pandémie, notamment pour préserver les liquidités? Quels sont selon vous les facteurs qui pourraient permettre de rétablir ces dividendes ou de réallouer des capitaux aux actionnaires?

 

MP : C’est bien sûr quelque chose dont nous discutons beaucoup dans les réunions du conseil d’administration. Nous versons des dividendes depuis des années. Depuis que je suis chef de la direction, nous les avons augmentés chaque année. Évidemment, c’était avant la pandémie. Cela reste, et restera, un de nos sujets prioritaires.

Mais, soyons honnêtes : nous ne sommes pas encore sortis de la pandémie. Il reste du pain sur la planche. Nos marchés finaux, comme le transport aérien, sont encore très loin de leur niveau prépandémique.

Je pense que, même si les choses se sont beaucoup améliorées, il reste du chemin à faire avant que nous puissions décider, en toute confiance, de rétablir les dividendes. Parce que, premièrement, nous ne sommes pas encore revenus là où nous étions et que, deuxièmement, il y a une profusion d’occasions que nous pouvons saisir pour assurer une croissance très rentable de notre entreprise. Notre croissance reste notre priorité absolue.

Nous avons toujours eu trois grandes priorités. La première d’entre elles, c’est la croissance, et c’est ce qui nous occupe actuellement. Redonner de l’argent aux actionnaires, c’est aussi une de nos priorités, mais elle passe après la croissance. Il va de soi que nous évaluons la pertinence de toutes les occasions de croissance qui se présentent. Nous mettons notamment dans la balance les rachats d’actions. Nous n’y avons pas souvent recours, mais nous les utilisons pour neutraliser la dilution qui a eu lieu au cours des dernières années, avant la pandémie. Nous considérons de la même façon la question des dividendes.

Nous ne sommes pas à court d’idées pour stimuler notre croissance, et il faut souligner que notre taux de rendement est très élevé. Par exemple, nous investissons actuellement dans notre réseau, et nous le ferons encore plus au cours de l’année qui vient. C’est pour nous une occasion de déployer des capitaux, dont une grande partie sera consacrée aux avions d’affaires, donc essentiellement à des compagnies aériennes. Nous les avons convaincues de faire plus de formation avec nous maintenant, avant que leurs activités ne reviennent à la normale.

Entre nous, c’est une très bonne chose pour ces compagnies d’aller de l’avant avec nos formations. Nous allons y mettre les capitaux nécessaires. Notre feuille de route montre que nous avons un rendement très élevé : de 20 % à 30 %[1] au bout de seulement trois ou quatre ans. C’est ce que nous faisons. Voilà pourquoi la question des dividendes reste toujours ouverte. J’aimerais que tout soit comme avant, mais ce n’est pas le cas, et entretemps, il faut pouvoir évaluer objectivement si c’est une bonne idée de verser ou non des dividendes.

VT : C’est logique, et nous sommes tous enthousiastes à l’idée que vous fassiez une priorité d’augmenter la capacité de l’entreprise à générer des revenus. C’est une excellente stratégie, qui vise aussi à vous permettre de protéger le bilan de l’entreprise et de mieux gérer ses flux de trésorerie.

Marc, est-ce que vous pourriez maintenant nous parler des enjeux ESG – un sujet qui est au cœur de l’actualité – et du rôle de CAE comme chef de file dans ce domaine au Canada? J’aimerais vraiment que vous nous présentiez le parcours de CAE, ses premiers pas et son évolution, par rapport à ces questions, pour mieux comprendre votre vision des choses.

 

MP : Merci de me poser cette excellente question, et aussi de saluer notre leadership dans cette branche. Allez jeter un œil au rapport de nos activités de l’an dernier. J’en suis vraiment très fier. Vous y verrez la manière dont nous gérons les questions environnementales, sociales et de gouvernance, ou ESG, ce que nous avons commencé à faire bien avant qu’on les appelle comme cela. Notre intérêt pour ces enjeux vient en partie du fait qu’ils s’inscrivent dans les nobles ambitions de notre entreprise.

Ce que nous faisons, c’est rendre les déplacements aériens plus sécuritaires. Dans le secteur de l’aviation civile, mais aussi dans celui de la défense, où nous formons les gens pour qu’ils puissent accomplir leur mission et rentrer à la maison en toute sécurité. Tout cela se passe dans des simulateurs, ce qui fait que, par définition, nous éliminons une grande quantité des émissions de gaz à effet de serre qui auraient été potentiellement émises. Évidemment, nous pouvons les réduire encore plus, parce que, croyez-le ou non, il y a encore beaucoup de formation sur de vrais appareils, surtout dans le secteur de la défense. En privilégiant les simulateurs, on fait un pas dans la bonne direction.

Nous sommes très transparents sur nos chiffres. Si vous les regardez de plus près, vous verrez que nous nous conformons aux normes de la Global Reporting Initiative, ou GRI, et que nous communiquons nos émissions de carbone. Nous avons aussi ajouté une nouvelle section dans notre rapport, où nous évaluons nos activités vis-à-vis des normes du Sustainability Accounting Standards Board (SASB). Nous posons donc un regard objectif sur nos activités.

Il y a quelque chose que nous avons fait durant la pandémie, et dont je suis fier : nous sommes devenus carboneutres. C’était un engagement que j’avais pris auparavant, et j’ai mis notre équipe au défi de le faire. Et nous y sommes arrivés. Même quand la pandémie faisait rage, nous avons gardé le cap. C’est une prise de position. Dans les faits, nous produisons des émissions; la carboneutralité nous coûte donc de l’argent.

Nous avons commencé en posant des gestes concrets. Nous avons 75 centres de formation dans le monde et nous sommes passés à l’énergie renouvelable là où c’est possible. C’est donc une façon de réduire tangiblement nos émissions. Pour ce qui est des émissions impossibles à éliminer, nous les compensons en achetant des certificats verts et des crédits de carbone compensatoires. Quand nous parlons de ces mesures à nos employés, ils y adhèrent complètement. C’est ce qui fait, entre autres, que nous sommes un employeur de choix.

Les jeunes qui sont en début de carrière veulent travailler pour une entreprise qui s’investit réellement sur le plan social, pas une entreprise qui, pour épater la galerie, publie des chiffres qui font paraître la réalité plus belle qu’elle ne l’est.

Je me suis aussi engagé à convertir plus de la moitié de nos appareils. Cela surprend certaines personnes. Eh oui, nous avons une flotte de plusieurs centaines d’avions. Si nous sommes un fournisseur de formations sur simulateurs, nous avons aussi, je pense, le plus grand réseau mondial d’écoles de pilotage, dont la plus grande se trouve à Phoenix, en Arizona. J’ai donc pris l’engagement de faire passer à la propulsion électrique ou hybride la moitié des centaines d’appareils utilisés dans ces écoles au cours des cinq prochaines années – c’est du moins l’objectif audacieux que je vise.

Le but, c’est toujours de réduire nos émissions. Mais cela réduit aussi les coûts, ce qui est bien sur le plan opérationnel. Il va sans dire que cette transition exigera un investissement. Toutes ces mesures, nous les prenons pour établir une nouvelle norme, et montrer l’exemple. Nous sommes la première entreprise d’aérospatiale et de défense carboneutre au Canada. Cela envoie aux autres entreprises un message, celui qu’elles doivent emboîter le pas.

VT : Ce sont des initiatives formidables. Vous avez beaucoup parlé du volet environnemental. J’aimerais maintenant que vous nous parliez de la dynamique sociale et des priorités de l’entreprise dans ce domaine, lesquelles peuvent influer sur sa gouvernance. Parlez-nous un peu de cette dynamique et de ce que vous comptez faire pour le « S » de l’ESG.

 

MP : Il s’agit selon moi d’exercer son leadership avec authenticité. Et pour y arriver, nous devons miser sur la diversité. Nous avons une équipe solide, très solide. Nous ne valorisons pas la diversité pour respecter une exigence quelconque. Nous croyons seulement que c’est avantageux pour nous.

Il y a une chose que j’ai apprise, et qui est devenue pour moi un mantra : une entreprise, c’est d’abord les gens qui la composent. Je dis souvent que si on enlevait les personnes qui travaillent dans notre entreprise, il ne nous resterait que des immeubles vides avec une enseigne dessus. Inversement, si on prend nos employés et qu’on les met dans n’importe quels autres immeubles, n’importe où dans le monde, nous avons quoi? Notre entreprise. Les personnes qui viennent dans nos bureaux jour après jour, il faut les mobiliser au quotidien, comme il faut convaincre les autres de venir joindre nos rangs. Pour ce faire, nous devons rendre notre entreprise attrayante en mettant en valeur nos priorités sociales, et faire en sorte qu’elle soit représentative de notre société. Voilà en quoi consiste la diversité.

Comme je l’ai déjà dit, c’est aussi une stratégie gagnante. Pour le recrutement, nous entrons en concurrence avec des entreprises du monde entier, et c’est de plus en plus difficile. Les entreprises qui tireront leur épingle du jeu sont celles qui sauront attirer et retenir des employés fiers d’y travailler. Pour y arriver, elles doivent être représentatives de leur collectivité.

Nous avons mis sur pied des groupes de ressource pour les employés, et je suis très fier du fait que ces groupes sont sous la responsabilité des membres du comité de direction, lesquels sont mes subordonnés directs. D’ailleurs, nous avons justement lancé un de ces groupes hier, celui pour les employés vétérans. C’est Daniel Gelston, président du groupe Défense et sécurité et lui-même vétéran, qui dirige ce groupe. Il s’agit d’un véhicule vraiment efficace pour interagir avec nos employés. Cela montre aussi que CAE est un employeur qui se démarque grâce à une orientation sociale très forte, et qu’il fait bon y travailler. C’est donc une excellente chose pour nous.

VT : Absolument. Ça ouvre la voie, je crois, à ma prochaine question. Les élections canadiennes ont eu lieu récemment, et la géopolitique retient l’attention de tout le monde. Vous êtes à la tête d’une entreprise canadienne disposant d’une vaste expertise et ayant des visées mondiales. Quelle est l’incidence de l’évolution du contexte géopolitique sur les activités d’une entreprise comme la vôtre?

 

MP : Honnêtement, cela ne change pas grand-chose. Notre siège social se trouve au Canada, mais moins de 10 % de nos revenus y sont générés – je n’ai pas les chiffres les plus récents avec moi. Nous sommes plutôt une entreprise mondiale. Plus de la moitié de nos employés, probablement autour de 60 %, sont à l’extérieur du Canada. Ce n’est donc pas exagéré de dire que nous sommes une entreprise mondiale, avec une équipe de direction locale qui veut agir à l’échelle locale.

Si nous avons des activités aux États-Unis dans le secteur de la défense, nous sommes une entreprise américaine de défense. CAE USA est considéré comme un fournisseur américain dans le secteur de la défense. Dans ces conditions, je dirais que l’environnement géopolitique ne nuit pas vraiment à nos activités.

Comme toutes les autres entreprises, nous devons composer avec le grand virage géopolitique en train de se produire en Asie, notamment. Nous savons qui sont les acteurs en jeu et que nous devons naviguer dans ces eaux-là. Il y a des inconvénients, mais aussi des avantages. J’ai mentionné que l’armée devait se préparer en conséquence – pour quelque chose qui, espérons-le, n’arrivera probablement pas.

En même temps, nous avons de nombreux contrats là-bas. Nous surveillons ces éléments, et espérons que les choses ne prendront pas une tournure tout autre dans les prochaines années. Je le répète, nous sommes une entreprise canadienne, mais surtout une entreprise technologique mondiale.

VT : Oui, et je crois qu’on ne se rend pas compte de l’empreinte mondiale de CAE, et de sa présence dominante dans certains secteurs verticaux. Merci de nous avoir fait part de vos réflexions. Vous avez abordé beaucoup de choses, notamment certains aspects méconnus de CAE avant et après la pandémie. Auriez-vous autre chose à ajouter sur ce que l’on connaît ou aime moins à propos de CAE? Et je vous laisse ensuite le mot de la fin, Marc.

 

MP : Je pense que beaucoup de personnes ne connaissent pas complètement notre entreprise. Au début de la pandémie, notre action se négociait à 42 $. Quand le secteur du transport aérien s’est effondré, son cours a chuté à 14 $ ou 15 $ du jour au lendemain. C’est la raison pour laquelle beaucoup de personnes ont une mauvaise perception de CAE, et nous mettent dans le même panier que toutes les autres actions de compagnie aérienne. Nous avons prouvé que ce n’est vraiment pas le cas. C’est donc un premier point sur lequel on se trompe parfois.

Ces temps-ci, même depuis quelques mois, on me dit souvent que nos activités de formation doivent connaître une reprise formidable vu que les gens se ruent pour prendre l’avion. Cela se passe aux États-Unis, et cela représente là-bas une belle occasion à saisir. En revanche, les choses n’ont pas redémarré au même rythme ailleurs dans le monde. On le ressent beaucoup plus au Canada. En Extrême-Orient, certains de nos centres de formation sont simplement fermés parce qu’on ne peut pas y accéder.

Il faut absolument comprendre que nous ne travaillons pas seulement pour les compagnies aériennes, mais que plus les gens reprennent l’avion, plus les besoins en formation des compagnies aériennes devraient croître, et plus il y aura de possibilités devant nous. C’est ce qui est arrivé auparavant, et qui arrive maintenant aux États-Unis : les compagnies aériennes doivent massivement faire appel à des fournisseurs pour former leurs pilotes et être ainsi en mesure de répondre à la demande des consommateurs pour les vols.

C’est ce qu’on appelle une « bulle » de formation, et les gens ont du mal à le comprendre. Par exemple, à cause de la pandémie, beaucoup plus de pilotes ont pris leur retraite. Ils se sont peut-être dit que le volume de travail fluctuait trop pour eux. Quoi qu’il en soit, cela a provoqué un véritable séisme. C’est pour cela qu’aux États-Unis, à l’heure actuelle, une partie de la formation vise à remplacer les pilotes qui s’en vont à la retraite.

La réalité, c’est que la plupart des compagnies aériennes doivent composer avec de puissants syndicats de pilotes, qui fonctionnent selon un principe d’ancienneté. S’il y a des départs à la retraite, ou des changements d’avion parce que la compagnie réduit sa flotte – ce que toutes les compagnies ont dû faire pendant la pandémie –, ce sont les pilotes ayant le plus d’ancienneté qui prennent les commandes des appareils, et par ricochet certains pilotes deviennent copilotes. Ces mouvements créent de grands besoins de formation que nous pouvons combler. C’est quelque chose que l’on oublie parfois. Généralement, les pilotes doivent suivre une formation environ tous les six mois. C’est le cas lorsqu’une personne pilote un nouvel appareil ou change de fonction. Ce n’est pas une formation de quelques jours seulement. On parle plus d’un mois. Ils passent donc beaucoup de temps dans un simulateur. Dans le monde, il n’y a pas assez de simulateurs ou de capacités pour répondre à la demande de formation des pilotes. Les compagnies aériennes doivent planifier leurs besoins, et parfois elles ne le font pas très bien. Pour nous, c’est une occasion en or à saisir.

À mesure que nous retrouverons une vie normale et que les frontières rouvriront, il y aura moins de restrictions concernant les déplacements, les gens recommenceront à prendre l’avion et la demande pour les formations grimpera en flèche. Ce qui est intéressant, c’est que chaque fois que les activités aériennes sont perturbées, nous avons une forte demande. Quand on regarde l’évolution du cours de notre action, on ne fait pas souvent ce lien, ce que je constate souvent.

VT : Je suis d’accord avec vous, Marc. Malgré les fluctuations de l’action, nous sommes très contents, en tant qu’investisseurs axés sur la valeur, de pouvoir être propriétaires d’une entreprise fantastique. J’aimerais prendre un instant pour vous remercier, Marc et Andrew, de nous avoir accordé cette entrevue exceptionnelle, d’avoir permis de mieux connaître le fonctionnement de la division canadienne de CAE, dont vous faites partie et qui joue un rôle de premier plan. Merci à toutes les personnes qui ont assisté à notre discussion. Si vous avez des commentaires ou des questions, n’hésitez pas à communiquer avec votre directeur des relations d’affaires. Encore une fois, merci à tout le monde, Marc, Andrew et tous les spectateurs. Je vous souhaite une excellente journée! Au revoir.

MP : Merci à tous! Au revoir.

 

[1] Remarque : Durant l’événement, M. Parent s’est trompé lorsqu’il a parlé du rendement sur capital investi, mentionnant une fourchette de 30 % à 40 %.

 

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Ce document est une transcription d’une discussion avec Marc Parent, président et chef de la direction de CAE Inc., laquelle a été adaptée par souci de clarté et est diffusée avec l’autorisation expresse de l’entreprise. Les renseignements contenus dans ce document ne constituent pas des conseils juridiques, financiers, comptables, fiscaux, liés aux placements ou autres, et ne doivent pas servir de fondements à de tels conseils. Il ne s’agit pas d’une invitation à acheter ou négocier des titres. Beutel, Goodman & Company Ltée ne cautionne ni ne recommande les titres dont il est question dans le présent document.